...
Le
destin vient de s'ouvrir, ma sentence sera prochainement exécutée.
Je
m'y attendais, je ne m'étais pas fait d'illusions sur mon sort.
Je suis
passé en jugement, au réquisitoire, je suis condamné à la peine de mort.
Je ne suis pas seul.
Malgré tout ce que l'on aura pu dire de moi, je
mourrai avec la conviction d'avoir fait quelque chose pour la France, car on ne
fusille pas pour un simple "vol".
Les lois de la guerre. Non, ce n'est
pas cela, j'étais Franc-Tireur.
Ma peine, je n'en ai pas.
Je
n'ai qu'un regret, celui de ne pas voir la victoire finale.
Sans espoir
? Oui, pour moi, mais toi Papa, tu pourras dire que ma mort sera digne d'un bon
Français.
Ma patrie, je n'en ai qu'une. Je n'ai pu me mettre à genoux
devant l'oppresseur. Pour moi c'est la fin, mais la France sera belle après la
guerre.
Tu auras payé ton tribut, tu pourras lever la tête et regarder
fièrement cette terre pour laquelle on sait mourir.
Je pense à mon oncle
François, tué à l'autre guerre, et espère que mon frère François (1) arrivera pour
vous donner une consolation qui sera la mienne.
J'embrasse tout le monde
bien fort, Ida, ma mère, et surtout ma grand-mère.
Roger. |